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Cinq propositions pour refonder notre Système de santé

                                      

L’Association des « Alumni et Amis de l’APHP » a décidé, en Assemblée générale, de participer au débat national lancé par les pouvoirs publics sur la Refondation du système de santé.

Si l’Association a pour mission principale de participer à la vitalité de l’APHP à partir d’expériences individuelles et collectives de ses membres, elle est atterrée par sa dégradation, sa fuite de personnels de toute catégorie tandis que sévissent épidémies et pandémies mortifères. Les membres du conseil d’administration de l’Association dans ces circonstances gravissimes se sentent le droit de faire part de leurs réflexions qui s’inscrivent dans le débat national qui a été lancé.

Il apparaît aujourd’hui que les solutions pour faire face à la situation sanitaire très complexe que tous les Français connaissent, notamment les sous-dotations en soins, doivent être appréhendées régions par régions, un zonage qui peut être discuté.

C’est dire que notre Association souhaite prendre en considération la situation sanitaire de toute l’Ile-de-France et non de la seule AP-HP ; l’ensemble des structures publics devraient y harmoniser leurs actions avec les établissements privés non lucratifs.

Mais nous nous sommes autorisés d’aller plus loin encore dans nos réflexions, en faisant une proposition qui refonde totalement notre système de santé en péril.

Proposition n°1 : Refonder les missions du service public de santé

La mission essentielle du service public de santé est d’assurer l’accès aux soins de tous et en permanence, il y va de l’éthique. Elle suppose à la fois des acteurs en nombre suffisant et qualifiés. Les conditions de travail et de vie quotidienne (délai de transport logement-travail, gardes d’enfants, rémunérations ajustées en fonction du lieu d’exercice…) doivent être prises en considération en dehors de tout corporatisme. Cette organisation associant hôpitaux publics, privés, personnels salariés et libéraux pour former un continuum permettra d’huiler les « parcours de soins ».

L’efficience de cette mission relève aussi du citoyen qui doit disposer d’accès au numérique partout, et bénéficier d’une éducation à la santé non seulement dès l’enfance mais tout au long de la vie, rendant ainsi la possibilité de téléconsultations efficaces.

Personnels soignants et citoyens doivent être unis autour de la nécessité de la prévention, source d’économies considérables, de compréhensions mutuelles, de solidarité, d’humanisme vrai et non de façade.

Proposition n°2 : décentraliser le pilotage du système de santé

Il convient de redéfinir le rôle de l’État central pour confier aux collectivités locales régionales le soin de piloter le système de santé, au plus près, dans leurs territoires.

L’État doit rester garant de la qualité et de la réalité des compétences des professionnels de santé, et il doit aussi avoir la responsabilité exclusive de la gestion des crises sanitaires.

Dans ce cadre, il est clair que les Régions deviendraient responsables de l’efficacité du système de santé y compris des dérives éventuelles budgétaires.

Proposition n°3 : créer un statut unique de service public de santé

 Le système de santé français est financé, pour l’essentiel par l’Assurance Maladie, indifféremment du statut des acteurs de santé. C’est un atout qu’il faut préserver.

Les Établissements publics de santé disposent d’un statut particulièrement réglementé qui constitue autant de freins à l’évolution nécessaire des organisations et des pratiques. Cette absence de flexibilité, de réactivité par rapport à l’acquisition d’équipements, par exemple, constitue un tel handicap qu’il est responsable de la démotivation de soignants qui désertent l’hôpital public. Les Établissements privés à but non lucratif partagent les valeurs du service public mais en refusent les travers. Leur souplesse devrait être permise pour l’hôpital public, voire en devenir la règle.

Une proposition plus audacieuse encore serait de permettre à des Groupes Hospitaliers de territoire (GHT) de bénéficier du statut de fondation s’ils le souhaitent et à titre, au moins expérimental.

Proposition n°4 : Simplifier la gouvernance des établissements publics de santé

La notion d’hôpital-entreprise, de performance économiques et financières a pris le dessus au détriment des préoccupations de qualité des soins sous la conduite de managers hospitaliers aux considérations bien éloignés du charisme des personnels soignants. Le manque de Temps médical constitue une souffrance partagée par les patients et ceux qui les soignent et les accompagnent dans leurs douleurs physiques et psychologiques.

Les structures médicales et médico-sociales ne sont pas des administrations.

Proposition n°5 : Repenser la triple mission des CHU

Nous avons écrit en préambule que nos réflexions pour l’avenir se voulaient ambitieuses.

Aujourd’hui les CHU doivent être réinventés compte tenu de l’évolution des connaissances médicales, de l’évolution des technologies, de la pratique partagée des prises en charge. Ils ne peuvent plus être à la fois des hôpitaux de proximité, des hôpitaux généraux, voire des hôpitaux gériatriques, tout en cherchant encore à être des hôpitaux de recours, de recherche et d’innovation.

Le statut des médecins hospitalo-universitaires qui se voient, en principe, dans l’obligation de porter les trois missions de soins, d’enseignement, de recherche et pour certains, en supplément, celle de management, doit être maintenu en soulignant que le temps consacré à chaque type d’engagement varie d’un praticien à un autre et/ou peut varier chez chacun au cours de sa carrière. Le contingentement du nombre de professeurs est par ailleurs un frein aux ambitions des plus dynamiques.

La gouvernance de cet ensemble pourrait être unique ou partagée selon la volonté et l’engagement des acteurs.

Les activités industrielles des CHU notamment numériques et d’innovations, pourraient être portées par des sociétés commerciales créées par les CHU, partagées avec des partenaires privés.  Il faudrait envisager que la santé puisse représenter non un coût mais que le secteur sanitaire puisse constituer un apport économique à la France.

Encore faudrait-il que le personnel médical recouvre sa réputation d’antan en étant d’abord réellement considéré par les décideurs du pays.

Jacques Gonzales