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Quelques progrès attendus de la Science Ouverte pour la Santé

Cette réflexion prospective est issue de deux expériences. (i) Mon utilisation constante des Current Contents (Institute for Scientific Information ISI) dès 1960, ensuite de Medline (National Library of Medicine NLM) à partir de 1966, ensuite de PubMed (NLM) à partir de 1996, pendant ma formation et ensuite pendant mes fonctions de praticien, de chercheur et de professeur. (ii)  Ma pratique de la méthode du consensus formalisé à la HAS (où j’ai présidé un Groupe national de Pilotage Autisme).

 

  1. Améliorations de la recherche fondamentale, translationnelle et clinique
  • Réseautage européen et mondial pour la priorité à donner à certains projets de recherche
  • Possibilités de réseautage continu pendant le processus de recherche. Ce réseautage doit être soigneusement sélectionné et contrôlé pour motif de sécurité.
  • Amélioration des critères bibliométriques pour certains recrutements de chercheurs, de praticiens et d’enseignant, ainsi que pour l’évaluation d’équipes.
  1. Amélioration de la sélection des manuscrits et articles scientifiques à publier ou déjà publiés, en particulier :
  • Afin de contribuer à améliorer ou de compléter le système actuel des « referees »
  • Afin de réduire le nombre de publications fausses, inutiles et de plagiats.
  • Afin de réduire les coûts de l’édition – publication par le contrôle de qualité et le dépistage de fautes éthiques et d’escroqueries, ainsi que par l’assainissement du marché et la réduction des doublons lorsque c’est possible.
  1. Parmi les bénéfices que l’EBM (Evidence Based Medicine ou Pratique Basée sur la Preuve), les Recommandations de Bonne Pratique ainsi que les organismes régulateurs et de gouvernance peuvent attendre de la Science Ouverte et des outils de l’Intelligence Artificielle qui s’y rattachent, citons :
  • Une amélioration de la qualité et de la pertinence des publications scientifiques, ainsi que de leur analyse par les unités d’étude critique de ces publications au service des recommandations de bonne pratique et des diverses formes de consensus référentiel.
  • Une aide à l’établissement du consensus référentiel et des recommandations par une meilleure intégration : (i) des preuves scientifiques lorsqu’elles existent ; (ii) du consensus des professionnels ; (iii) des préférences des « utilisateurs ».
  1. Quant à la  disponibilité et à l’accès aux fonds documentaires dans le domaine de la santé et de la biomédecine (qui sont un aspect de la Science Ouverte) notre réunion est l’occasion de relancer une demande d’actions coordonnées françaises et européennes des institutions publiques et privées d’utilité publique sans but lucratif afin de fournir, durant toute leur vie, même après la fin de leur activité principale, aux médecins et aux autres personnels de soin, de recherche et d’enseignement les articles dont ils ont besoin pour leurs activités et pour leur participation constante à la formation médicale continue (FMC), pour eux-mêmes et pour les autres, ainsi qu’à l’éducation à la santé de nos populations. C’est déjà le cas depuis plusieurs années pour de nombreux articles accessibles rapidement et mondialement sans avoir à payer de droit pour les consulter et les télécharger. Comme cela a déjà été évoqué plus haut, des opérateurs commerciaux sont évidemment indispensables ; il importe de les soumettre à des contrôles de qualité ainsi que de l’éthique et au respect financier tant des utilisateurs que des financeurs publics et privés de la recherche et de l’enseignement de la santé.
  1. Les principaux bénéfices que la Science Ouverte peut attendre des organismes nationaux, régionaux et locaux de consensus référentiel (tels la HAS, KCE, NICE, SIGN, CDC et les institutions similaires) sont l’intégration dans les données de la Science Ouverte des consensus référentiels et des recommandations de bonne pratique produits par ces institutions, ainsi que leurs méthodologies, et leurs résultats lorsqu’ils sont connus. Cela n’enlève rien au fait qu’un consensus référentiel, pour être valable et applicable, doit être élaboré au niveau local ou régional ou national ou « continental », selon les cas, même s’il est important de le faire figurer à titre documentaire dans les bases de données mondiales. L’analyse correcte des preuves scientifiques, lorsqu’elles existent, a quant à elle et d’emblée une validité « globale » au moins temporaire (jusqu’à l’apparition d’une nouvelle découverte).
  1. Dans ses différents aspects, la Science Ouverte devrait contribuer à la formation de base, à la formation spécialisée et à la formation continue des médecins et d‘autres personnels de santé. Je cite ici un vœu émis à ce sujet par certains dans la récente réflexion en faveur d’une « refondation » en France.
  • Nécessité de maintenir l’accessibilité aux publications biomédicales nécessaires à la pratique de leur spécialité (y compris médecine générale) à tous les médecins de France dès leur formation jusqu’à leur décès (s’ils le souhaitent). Motifs :
    • Avant tout pour améliorer constamment la qualité des soins.
    • Comme outil de formation générale et spécialisée.
    • Pour la formation continue pendant toute la carrière principale et pendant l’activité médicale post-retraite après l’activité principale.
    • Poursuite de l’éducation à la santé de la population par des retraités qui acceptent de le faire, même après la cessation de toute activité clinique, de recherche et d’enseignement.
  • L’accès gratuit aux publications pour les praticiens, les chercheurs et les enseignants est aussi un atout :
    • Pour l’amélioration du confort professionnel et de la rémunération des médecins.
    • Pour l’amélioration des relations entre certains gestionnaires et nombre de médecins praticiens.
  • Soutenir les éditeurs de France et de la francophonie (et les éditeurs internationaux qui publient aussi en français) pour assurer en permanence la publication de livres, d’articles « papier » et d’articles « électroniques » en langue française couvrant l’ensemble de la médecine générale et des spécialités et surspécialités très pratiquées. Prévoir un comité francophone international pour veiller à la qualité, à la viabilité et à l’opportunité de ces publications. En effet, un pourcentage minoritaire mais non négligeable de médecins francophones ont besoin de publications en langue française pour en tirer un bénéfice optimal ou suffisant pour la qualité de leur pratique.

 

Pr Philippe EVRARD

Vice-président de l’AAA-APHP

philippe.evrard@aphp.fr

 

Remerciements

Boris Attencourt, docteur en sociologie de l’EHESS, vient d’achever un postdoctorat sur la Science Ouverte à l’Université Paris Cité (UPC). Je le remercie de m’avoir accompagné dans mon initiation et mes réflexions sur la Science Ouverte, particulièrement pour le programme auquel je participe actuellement sur la recherche et sur le consensus concernant de nouvelles méthodes dans l’autisme et le neurodéveloppement. Il m’autorise à transmettre son adresse courriel pour le cas où vous souhaiteriez le joindre : borisattencourt@gmail.com à propos des résultats de son « post-doc » sur la Science Ouverte.

 

Références

¤ Bernard RENTIER. Science Ouverte, le défi de la transparence. 2018, 143 pages. Collection L’Académie en poche, Editions de l’ARB, Bruxelles. Ce livre est consultable et téléchargeable gratuitement sur le site internet www.academie-editions.be

¤ COMMMITTEE ON TOWARD AN OPEN SCIENCE ENTERPRISE. Open Science by Design: Realizing a Vision for 21st Century. Research (2018), 232 pages; Board on Research Data and Information; Policy and Global Affairs; Academies of Sciences, Engineering, and Medicine 2018. Ce livre est consultable et téléchargeable sur le site NAP http://nap.edu/25116 (THE US NATIONAL ACADEMIES PRESS)

¤ Site de la Commission Européenne, constamment mis à jour, comportant, notamment, les programmes européens de SCIENCE OUVERTE https://research-and-innovation.ec.europa.eu/strategy_en

 

 

Le Sénat

 

De gauche à droite:

  • Philippe Evrard, Vice-président de AAA-APHP
  • Guy Collet, Président de AAA-APHP
  • Alain Milon, Médecin, Sénateur, Vice-président de la Commission des Affaires Sociales du Sénat
  • Pierre Corvol, Professeur et Administrateur honoraire du Collège de France, Ancien Président de l’Académie des Sciences, Membre de l’Académie nationale de Médecine