DROGUE
Un des traitements politico-juridiques les plus aberrants est celui des drogues.
Des siècles de dolorisme chrétien et de culte de la tempérance font voir le plaisir des hallucinogènes comme moralement répréhensible. Donc, il faut l’interdire.
Une exception caractéristique : les boissons alcooliques ; surtout le vin. Quoique l’ivresse soit dangereuse, ce breuvage est favorisé, car, rituellement consacré, c’est le sang du Christ.
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Les drogues sont donc interdites. Résultat ? Il est catastrophique ! Doublement catastrophique.
Primo : interdire l’usage d’une drogue en réduit peu la consommation.
Secundo : le commerce des drogues est alors confié en monopole à la Mafia.
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Quand on est - cela arrive ! - exceptionnellement rationnel, on n’applique pas un principe, sans regarder aux résultats de sa mise en œuvre. La conclusion doit tenir compte de l’expérience.
Quoi de plus concluant que celle de la célèbre Prohibition américaine ?
De 1920 à 1933, les Etats-Unis interdisent, à l’échelle nationale, la fabrication, le transport, la vente, l’importation et l’exportation - bref la consommation - des boissons alcoolisées.
Quantité de ligues chrétiennes avaient lancé des campagnes virulentes pour exiger ce tabou ; soutenues par les plus intolérants des mouvements conservateurs ; même le Ku Klux Klan s’était signalé en faveur de la prohibition... Toutefois, il faut aussi reconnaître qu’à l’époque les violences conjugales n’étaient pas rares : les femmes n’avaient pas tort de souligner que les maris alcooliques sont odieux avec leur épouse.
Un trait plaisant : comme il est impossible de célébrer une messe catholique sans fabriquer du vin de messe, le Président HARDING fut obligé de rassurer l’Eglise ; et aussi le Vatican !
Une fois la mesure appliquée partout aux U.S.A., les bandes criminelles s’empressèrent de produire clandestinement des alcools, le plus souvent frelatés et médicalement dangereux pour le système nerveux.
On sait que la prohibition fit la fortune (une immense fortune) des « ténors du crime organisé », dont Al Capone est le plus célèbre. Bref, échec complet.
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L’expérience ne convainc jamais les esprits bornés.
Aussi les drogues continuent d’être interdites, dans la grande plupart des pays.
Le MEXIQUE est sans doute l’exemple le plus tristement célèbre des effets effroyables de cet interdit : là-bas, la Mafia y achète tout pouvoir. Le Gouvernement est très largement corrompu ; ainsi que la police.
On découvre que, dans leurs laboratoires clandestins, les cartels fabriquent à grande échelle des drogues de synthèse ultra-dangereuses, telles que le « fentanyl », qui tue 30 000 personnes chaque année aux Etats-Unis. Sans parler des victimes de chantage et de règlement de compte que multiplient les rivalités entre pourvoyeurs.
Tout journaliste qui, bravant les menaces de mort, enquête au Mexique sur les liens entre la classe politique et les criminels de la drogue est systématiquement assassiné. Qu’importe ! Il n’est surtout pas question de renoncer à une morale stupide, contreproductive et finalement criminelle.
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Une solution ? Passer du clandestin au grand jour, car il est contrôlable.
A mon sens, il appartient à l’Etat de produire les drogues (à la façon dont en France il se réservait le tabac.)
Les vendeurs officiellement agréés seraient alors en mesure de faire connaître tous les dangers de l’addiction (comme cela se fait pour l’alcool), contrairement aux clandestins qui se gardent de les révéler.
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Et, bien entendu, pour cause d’évidente similitude, doit être transposé contre le danger des drogues, le régime juridique réprimant les délits commis « sous l’empire d’un état alcoolique ».
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Cela dit, il faudra imaginer un revenu de substitution, pour tous les « dealers » banlieusards qui ne vivent que du trafic de la drogue. La supprimer risque de provoquer une révolte générale des « ghettos » musulmans.
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